CONFÉRENCE INTERNATIONALE EN BIMODAL
LE SÉNÉGAL ET LES HYDROCARBURES 07 au 10 Juin 2021
« Penser les hydrocarbures pour ne pas les subir ».
Université Gaston BERGER de Saint-Louis
NOTE CONCEPTUELLE
Les hydrocarbures apparaissent comme une véritable aubaine pour le Sénégal. Toutefois, il subsiste de nombreux défis. Gérer le partage de la rente des hydrocarbures, en faire un véritable moteur de développement pour sa population, diversifier l’économie sénégalaise pour éviter la dépendance sont autant de défis auxquels le Sénégal doit faire face s’il veut maîtriser cette ressource si convoitée.
Le futur économique, social et environnemental du Sénégal sera fortement marqué par l’exploitation des hydrocarbures. Celui-ci aura des répercussions dans plusieurs secteurs allant de la pêche à l’environnement. Dans ce cadre, le Sénégal devra se doter des moyens permettant de profiter des opportunités offertes par les importantes découvertes d’hydrocarbures.
Du pétrole et du gaz ont été découverts en 2001 dans l'écorégion marine et côtière de l'Afrique de l'Ouest. Cette écorégion regroupe six pays : la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, la Guinée et le Cap Vert et couvre plus de 3500 Km de côte. Parmi les caractéristiques remarquables de cette zone, citons les zones humides côtières, et le puissant upwelling qui en font l'une des zones de pêche les plus variées et économiquement la plus importante au niveau mondial. Le fait que beaucoup d'espèces passent différentes phases de leur vie dans les eaux de ces six pays, souligne la nécessité de comprendre et de gérer l'écorégion comme un ensemble indissociable.
La pêche, dans cet écosystème, génère quelque 329.572.007.500 FCFA soit 500 millions d´euros chaque année, ce qui en fait aujourd'hui une source unique de devises dans la région et une source essentielle de revenus pour le développement économique et social. Environ 10 millions de personnes vivent le long de cette côte et plus de 600.000 hommes et femmes dépendent directement de la pêche et des industries connexes. Le tourisme côtier est également en train de devenir une importante activité économique.
Les hydrocarbures peuvent constituer une ressource vitale pour le Sénégal à l’instar du Ghana n’est pas le seul exemple des réussites africaines. Aujourd’hui, le pétrole apparaît comme une véritable aubaine pour des pays comme le Cameroun, la Côte d’Ivoire ou l’Ouganda. Toutefois, il subsiste de nombreux défis pour le continent de l’or noir. Gérer le partage de la rente des hydrocarbures, en faire un véritable moteur de développement pour sa population, diversifier son économie pour éviter la dépendance sont autant de défis auxquels le Sénégal doit faire face si elle veut maîtriser cette ressource si convoitée. Toutefois, l'histoire des hydrocarbures en Afrique est jalonnée de problèmes identifiés par le Rapport d´Evaluation des Industries Extractives (EIR) qui a mis en lumière des problèmes sociaux et environnementaux. D'autres écosystèmes marins et côtiers ont été endommagés par des activités pétrolières dans la sous-région, comme par exemple le delta du Niger au Nigeria.
Depuis les récentes découvertes de gisements d'hydrocarbures et l'annonce de l'entrée en production de plusieurs complexes en 2014, le Sénégal apparaît désormais sur la carte des hydrocarbures du continent. À ce jour, les réserves d’hydrocarbures principalement gazières sont de Neuf Cent Dix (910) milliards de mètres cubes de gaz à Grand-Tortue, le plus important gisement d’Afrique de l’Ouest. Des poches de 1030 millions de barils de pétrole brut ont aussi déjà été mises au jour. Le Sénégal devrait produire dès 2023 ses premiers barils d’or noir et de gaz naturel.
Ainsi l’exploitation des hydrocarbures va générer des revenus très importants pour l’économie sénégalaise. Il faudra s’assurer que ces revenus impactent positivement sur les très grandes attentes des Sénégalais en matière d’emploi, de santé, d’éducation, de services (eau, électricité, assainissement) et d’infrastructures. Le Sénégal doit relever le défi de l’exploitation des hydrocarbures, parce qu’il entre dans une nouvelle ère. Il passe par la maximisation et valorisation des nouvelles opportunités offertes par les hydrocarbures et la préservation de potentiel économique maritime à travers la pêche et le tourisme.
Cela permettra d’éviter les effets pervers de l’exploitation des hydrocarbures à travers d’une part le « Syndrome hollandais », d’autre part « la malédiction des ressources naturelles ». En effet, l'impact sur l’économie d’importants transferts de richesse ou de revenus miniers peut être traduit en deux effets pervers.
Le premier est d’ordre économique. Il est connu sous le nom de « Syndrome hollandais » et sa manifestation est purement mécanique. Toute augmentation importante des prix internationaux des produits du secteur extractif, en l’occurrence des hydrocarbures, entraîne un développement important de ce secteur en drainant vers lui une grande partie des capitaux et de la main d’œuvre au dépend des autres activités.
Le deuxième effet, appelé « Malédiction des Ressources Naturelles », est d’origine purement comportementale. Quand on bénéficie d’une manne minière et que, de surcroît, on est confiant quant à sa pérennité sur le moyen ou long terme, il est fort probable que l’esprit de rentier s’installe. Ce dernier n’incite ni à la diversification, ni à l’innovation et encore moins à l’esprit d’entreprise. Cette manne est en général mal répartie entre les citoyens et aggrave de ce fait les inégalités et les tensions sociales.
Il convient de souligner que la découverte d’hydrocarbures ne saurait constituer une malédiction qu’en cas de défaillance de la stratégie étatique de gestion à travers la conclusion de contrats défavorables, des retombées économiques insuffisantes pour les citoyens de recettes des hydrocarbures et l’instrumentalisation de cette frustration citoyenne.
Aussi, l’objectif de cette conférence sur « LE SÉNÉGAL ET LES HYDROCARBURES » est le développement d’une réflexion sur tous les aspects liés à cette nouvelle réalité pour le pays afin d’en tirer le meilleur parti.
L’exploitation du pétrole et du gaz va impacter au moins les cinquante prochaines années de la plupart des activités au Sénégal. Cette conférence constitue le début d’une réflexion marquant la contribution des universitaires aux enjeux et perspectives offerts par les hydrocarbures.
Le Sénégal présente des avantages géographiques et climatologiques qui confèrent à son littoral une réputation de zone très productive de la côte ouest africaine. Compte tenu de ces atouts, la pêche maritime sénégalaise occupe une place de choix dans l’économie nationale. La pêche est aussi la première branche exportatrice du pays. Ce phénomène est en hausse (188 463 tonnes en 2015), avec une valeur commerciale en augmentation constante depuis 2006, de près de 195 milliards de FCFA (20,87 %) en 2016. Le principal produit halieutique exporté est le poisson frais (79 %), suivi par les conserves (5 %), les produits transformés (4 %). La vie socio-économique du pays est donc rythmée en grande partie par le secteur de la pêche, qui emploie environ 600 000 Sénégalais (Source : ISS, Institut d’études de sécurité - rapport 2016).
Le développement des opérations pétrolières et gazières peut accroître les pressions sur l’environnement marin et côtier, déjà soumis à une intense activité de pêche commerciale. S’ils ne sont pas gérés de manière adéquate, les opérations d’Exploration et de Production et les relatives émissions et déversements de polluants dans l’environnement marin peuvent représenter une menace à la durabilité de l’écosystème marin et côtier local. L’exigence d’affronter ces impacts opérationnels ne fera qu’augmenter avec le temps, c’est pourquoi des mesures de prévention sont nécessaires dès maintenant en tant que solution la plus efficace du point de vue des coûts. Alors que le progrès technologique a réduit les risques de dommages environnementaux liés aux activités pétrolières et gazières, des perturbations des écosystèmes marins et côtiers sont prévisibles. Des impacts indirects sur la pêche artisanale et industrielle peuvent survenir et potentiellement affecter la reproduction, la migration et la survie des ressources marines qui peuvent être touchées par le développement pétrolier.
Les gisements sénégalais sont principalement gaziers et en eau profonde. Or les technologies de liquéfaction sont beaucoup plus difficiles à maîtriser que celles de l’extraction de pétrole brut. Les projets gaziers similaires en Angola ou au Nigeria en sont la preuve : leur entrée en production a été presque à chaque fois repoussée du fait de problèmes techniques.
Dès lors, des règles peu claires en matière de gouvernance du développement des activités pétrolières offshore peuvent provoquer des conflits avec la pêche artisanale et commerciale. La cohabitation de l’exploitation Off -Shore des hydrocarbures avec la pêche peut poser quelques problèmes qu’il convient d’identifier afin d’anticiper des mesures préventives voire curatives.
Tous ces impacts s’expriment avec une acuité particulière s’agissant des zones d’exploitation pétrolière. La région de Saint-Louis est particulièrement concernée. Il est question de définir la spécificité régionale des impacts susmentionnés et les stratégies de mitigation qu’il convient d’adapter. Une politique précise du contenu local de l’exploitation pétrolière et politique équitable de redistribution des revenus pétroliers sur un critère géographique est à cet effet souhaitable. Elle permettra aux sociétés sénégalaises de bénéficier des retombées financières de l’exploitation des hydrocarbures les sociétés sénégalaises sans oublier les collectivités locales impactées attendant beaucoup de ressources financières.
L’exploitation des hydrocarbures marque aussi l’apparition du Sénégal dans la cartographie des pays producteurs, aiguisant ainsi les appétits géopolitiques des grandes puissances et des multinationales. Reste à savoir si le Sénégal saura se réinventer par des stratégies innovantes afin de profiter pleinement des convoitises étrangères. Dans ce cadre, les participants sont invités à explorer et élucider un ou des aspects des questions décrites ci-dessus ou sur toute autre question relative à la thématique de la conférence :
Les participants sont informés que leurs papiers et présentations seront reviewés pour une publication des actes de la conférence.
Thématiques des communications